Les experts forestiers de l’Office national des forêts (ONF) développent des stratégies pour lutter contre les effets du réchauffement planétaire sur les forêts françaises. Ils envisagent un scénario de +4°C d’ici 2100, sachant que la France s’est déjà réchauffée d’environ 1,8°C depuis le début du XXe siècle.
Diversification des essences et introduction d’espèces étrangères
La principale solution proposée par l’ONF consiste en une « diversification des espèces d’arbres et des traitements hétérogènes« , notamment en introduisant des espèces « méridionales » ou « exotiques » plus au nord. Comme l’explique Albert Maillet, directeur des forêts et risques climatiques à l’ONF, la France est « le seul pays d’Europe à la confluence de quatre zones bioclimatiques : atlantique, continentale, montagneuse et méditerranéenne ». Ainsi, le massif forestier se compose actuellement de parcelles irrégulières :
- Bleu pour la régénération naturelle
- Beige pour les peuplements vieillissants
- Différents types de gestion allant du saumon au bordeaux pour les conifères et du vert clair au kaki pour les feuillus
- Des parcelles mélangées représentées en blond et orange
- Les landes cernées de bleu, les réserves hachurées de marron
Assister la migration des espèces d’arbres
Pour lutter efficacement contre le changement climatique, l’ONF utilise une stratégie d’assistance à la migration des espèces d’arbres. Cela commence par « observer » différentes parcelles forestières afin d’évaluer les effets du réchauffement planétaire sur les écosystèmes.
Par exemple, dans la parcelle 242, on trouve des chênes pédonculés plusieurs fois centenaires, accompagnés de hêtres et de charmes. Dans ce peuplement remarquable, l’ONF récolte les glands pour assurer la continuité de la génétique exceptionnelle du chêne pédonculé adaptée au climat local et qui pourrait potentiellement être plantée plus au nord dans l’avenir.
Dans la parcelle 237, un peuplement irrégulier de chênes coexiste avec des pins maritimes, des frênes et des alisiers, nécessitant d’autres approches d’aide à la migration. ;
Dans la parcelle 85, l’association entre les essences est moins réussie, la coexistence des pins sylvestres et des chênes sessiles étant plus difficile. Ainsi, l’ONF teste également, dans d’autres zones, des pins turquepins et des sapins espagnols sur de petites surfaces « pour pouvoir revenir en arrière », selon Albert Maillet.
Il souligne toutefois que, quelle que soit l’intervention humaine, les « nouvelles forêts pousseront à un rythme plus lent« . La récolte du bois dans une forêt en mosaïque est plus complexe qu’en peuplement régulier, mais moins difficile que dans une forêt mourante.
Le rôle crucial des gardes forestiers et du programme Renecofor
Les gardes forestiers jouent également un rôle important dans la lutte contre le changement climatique, notamment par le biais du programme de recherche « Renecofor », mis en place il y a 25 ans pour évaluer comment les écosystèmes forestiers réagissent au changement climatique. Christophe Chopin, garde forestier chargé de ce programme, explique que »
- Nous évaluons les niveaux de croissance des arbres
- Les dates d’apparition et de chute des feuilles
- La production de glands (pour les chênes)
Ainsi, en combinant diversification des espèces, introduction d’espèces exotiques et assistance à la migration, les expertises conjuguées de l’ONF et des gardes forestiers permettent d’élaborer des solutions innovantes pour adapter les forêts françaises aux défis posés par le changement climatique.